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Bertrand Piccard prône l’efficience pour sauver la planète

Publié le 13/03/2024      2 minutes de lecture

Premier homme à effectuer un tour du monde dans un avion propulsé par de l’énergie solaire, l‘explorateur suisse Bertrand Piccard veut prouver qu’il est possible de relever les défis écologiques sans décroissance.

Portrait de Bertrand Piccard Solar

@ Solar Impulse Foundation – Peter Sandground

Vous avez déclaré que votre avion à énergie solaire, Solar Impulse, n’a pas été construit pour transporter des passagers, mais pour transporter un message. Quel est-il ? 

Les énergies renouvelables et les technologies propres permettent d’atteindre des buts jugés impossibles et de rendre l’écologie attrayante. Quand j’ai lancé Solar Impulse, personne ne croyait possible d’effectuer un tour du monde avec un avion ne consommant pas d’énergies fossiles. Pourtant, je l’ai fait en 2016. Pendant que je volais dans le silence, sans consommer de carburant, sans polluer, j’ai acquis la certitude que notre monde est archaïque, inefficace, qu’il pollue car les technologies que nous utilisons sont obsolètes. Il faut arrêter ce gaspillage. Un moteur thermique a un rendement de 27%. Mes moteurs électriques 97%. Depuis le succès de Solar Impulse, j’ai fait de l’efficience mon cheval de bataille.

 

Vous pensez donc que la technologie peut résoudre la problématique du réchauffement climatique ?

La technologie peut détruire le monde autant qu’elle peut le sauver. Elle permet de faire mieux avec moins, de rentabiliser la décarbonation. Je suis un adepte de la décroissance du gaspillage, pas de la décroissance économique. Nous devons moderniser le monde, accepter le changement, lutter contre l’inertie, l’hyperconsommation. La Fondation Solar Impulse prouve par l’exemple que des systèmes novateurs peuvent nous aider à surmonter la crise climatique sans pour autant renoncer à notre mode de vie. Il faut arrêter d’opposer industrie et écologie. Nous avons besoin des deux et surtout de bon sens, de remettre l’humain au centre de tout, de privilégier l’économie circulaire.

 

Votre fondation édite un guide des solutions destiné aux décideurs politiques et économiques. Pourquoi cette cible et quels sont vos objectifs ?

Les leaders politiques et économiques détiennent notre avenir entre leurs mains. C’est donc à eux que je m’adresse pour les convaincre qu’action climatique peut rimer avec développement économique. Je lutte contre une fausse croyance qui bloque les initiatives. Non la mutation vers une économie durable n’est pas coûteuse, difficile, sacrificielle. Notre guide contient déjà plus de 1 500 solutions rentables pour décarboner, moins gaspiller, et ce dans tous les secteurs : l’eau, la mobilité, l’énergie, la construction, l’agriculture… Au départ, nous sommes allés chercher ces innovations dans les incubateurs, les forums, les fonds d’investissements. Maintenant les gens viennent à nous car notre label « solution efficace » les aide à trouver des financements, des partenaires.

 

Avec des outils comme Runway ou Solutions Explorer, vous positionnez votre fondation comme une intermédiaire ?

Tout à fait. Nous amorçons quelque chose de fondamental, dans un esprit pratique. Runway est un outil de mise en relation. Nous diffusons auprès des investisseurs les innovations labellisées comme écologiques et rentables par nos 370 experts. Solutions Explorer est un moteur de recherche en open source. Nous donnons aux décideurs politiques et économiques des informations pratiques, des solutions pour faciliter la mise en place de politiques environnementales. Nous sommes également en train de publier à leur intention de nouveaux guides, centrés sur l’urbanisme, les pays européens, la façon de faire de l’écologie positive, de rendre l’action climatique désirable.

 

Pensez-vous que les avions voleront un jour sans consommer d’énergie fossile ?

Soit l’industrie de l’aviation y arrivera, soit elle sera progressivement interdite. La solution des SAF (carburants aériens durables fabriqués à partir de biomasse) est facile d’utilisation, mais elle remet dans l’atmosphère du carbone capté. Donc elle n’est pas neutre. Actuellement, les moteurs électriques, avec l’hydrogène pour les gros avions et les batteries pour les petits, semble l’option la plus intéressante, mais elle demande encore beaucoup d’innovations. Je veux prouver que c’est possible en réalisant un tour du monde en huit jours, sans escale, dans un avion à hydrogène. 

 

Climate Impulse constitue votre prochain défi ?

Je veux faire un vol significatif. Mon avion sera plus lourd et plus petit que Solar Impulse. 34 mètres d’envergure pour 5,5 tonnes contre 72 mètres d’envergure et 2,3 tonnes. Solar Impulse était un symbole. Climate Impulse sera le précurseur d’un appareil opérationnel. Je veux révolutionner le monde de l’aviation. Climate Impulse volera à près de 200 km/h à 3.000 mètres d’altitude, avec de l’hydrogène produit à partir d’électricité d’origine renouvelable. Nous prévoyons un premier vol en 2026 et le tour du monde en 2028. Il reste encore des défis technologiques à relever avec l’aide de notre partenaire Syensqo, mais nous y arriverons.

 

Gérard Tur – decarbonation2030