Construction : se préparer à la montée en puissance de la RE2020

Publié le 23/08/2023  3 minutes de lecture

par la rédaction de decarbonation2030

La nouvelle réglementation environnementale entre en vigueur par paliers jusqu’à 2031. L’alimentation en énergie représente un défi majeur dès 2025, et les objectifs liés aux matériaux de construction imposeront une évolution des modes constructifs à partir de 2028. 

Réglementation : se préparer à la montée en puissance de la RE2020

Comme son nom l’indique, elle aurait dû entrer en vigueur en 2020. En réalité, le résidentiel neuf (collectif et individuel) n’est concerné par le RE2020 que depuis le 1er janvier 2022 et les constructions de bureaux et d’établissements primaires et secondaires, depuis le 1er juillet 2022. Pour les autres bâtiments tertiaires (hôtels, gymnases, crèches, etc.), l’échéance, initialement prévue au
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er juillet 2023, a été repoussée au 1er juillet 2024. 

La RE2020 est une réglementation environnementale, et non plus seulement thermique comme l’était la RT2012 qui l’a précédée. Outre la consommation énergétique des bâtiments, leur empreinte carbone est désormais prise en compte. C’est d’ailleurs ce qui explique les retards de mise en œuvre, en plus de la Covid-19 qui a ralenti les travaux de concertation avec la filière. Car le calcul de cette empreinte carbone n’est pas toujours chose aisée. Une période d’expérimentation a permis d’élaborer des modélisations, d’organiser des concertations au sein de la profession et de déterminer les seuils de la nouvelle réglementation. « Cette phase a porté sur les usages les plus courants, tels que ceux des bureaux et du résidentiel, précise Rodrigue Leclech, associé du cabinet Pouget consultants en charge du pôle Construction Île-de-France. Pour les autres types de bâtiments, nous manquons de retours d’expérience. » 

La RE2020 comporte six indicateurs. Le Bbio (conception bioclimatique et efficacité énergétique du bâti) et le CEP (consommation conventionnelle en énergie primaire), déjà présents dans la RT 2012, sont complétés par le Cepnr (consommation d’énergie primaire non renouvelable) et le DH (pour Degrés-Heures), qui évalue le confort d’été.  

Mais les indicateurs carbone (IC) énergie et construction, relatifs aux émissions de gaz à effet de serre liées aux consommations d’énergie et à celles liées à la construction du bâtiment et notamment aux matériaux utilisés, sont les nouveautés qui représentent les plus gros défis pour les professionnels. Globalement, la RE2020, alignée sur la Stratégie Nationale Bas Carbone, vise une baisse de 42% des émissions du secteur de la construction entre 2022 et 2031. 

Une étape majeure pour l’énergie en 2025

Concernant les émissions liées à l’énergie, l’effort est à fournir dès 2025 au niveau des logements collectifs, avec un seuil moyen d’émissions devant être divisé par deux (de 560 à 260 kg CO2/m² de surface habitable). Les réseaux de chaleur urbains bénéficient d’une dérogation jusqu’en 2028 pour faire évoluer leur mix énergétique. 

Ce seuil, qui n’évolue plus jusqu’en 2031, signifie la fin des solutions énergétiques 100 % fossiles dès 2025. Là où il n’existe pas de réseau de chaleur bas carbone, la pompe à chaleur (PAC) double ou triple usage (chauffage, eau chaude sanitaire et parfois production de froid) , éventuellement complétée par une chaudière à gaz, sera la solution. « Cette étape représente un défi industriel pour la profession, car les PAC sont aujourd’hui déployées en maisons individuelles, mais encore très peu à l’échelle d’un immeuble résidentiel collectif », souligne Rodrigue Leclech. Gare donc aux mises en œuvre approximatives qui risqueraient de faire de l’ombre à cette solution pourtant indispensable à la transition. 

Une trajectoire progressive pour les matériaux de construction

De 2022 à 2031, les émissions des matériaux de construction suivent une trajectoire par palier de 10 % chacun. « Les bâtiments construits il y a dix ans respectent déjà la cible 2022, affirme Rodrigue Leclech. Jusqu’en 2025 ce sera une phase d’apprentissage, d’acculturation à la mesure du CO2 et de formation aux outils tels que l’analyse de cycle de vie (ACV). »  

Le contenu carbone des matériaux, rapporté au m2, au m3 ou à l’unité  figure dans les FDES (Fiches de déclaration environnementale et sanitaire) recensées dans la base INIES, consultable et accessible à tous. Mais tous les matériaux n’en disposent pas et ce sont alors les « données environnementales
par défaut » (ou DED) du CSTB, « 
volontairement défavorables » selon Rodrigue Leclech, qui s’appliquent. « D’ici à 2025, il faut donc créer de la donnée pour les éliminer et éviter les trous dans la raquette. Techniquement, 2025 n’est pas une révolution, il y aura plus de matériaux bas-carbone disponibles et en elle-même, une meilleure maîtrise de la donnée devrait permettre un gain carbone. » 

Vers de nouveaux modes constructifs 

En outre, les hausses de coûts actuelles, indépendantes de la réglementation, poussent à la sobriété dans l’usage des matériaux grâce à une optimisation des modes constructifs. Ainsi, moins de béton c’est à la fois moins cher et moins carboné. « Mais il reste des progrès à faire en termes de sobriété architecturale, observe encore le consultant. Jusqu’ici, on se contente trop souvent de changer de produits sans modifier les formes. » 

Or, pour respecter la cible de 2028, prévient-il, « il faudra modifier les modes constructifs, utiliser beaucoup plus de bois, notamment en façade ». Tout le cadre de l’urbain et les documents d’urbanismes devront évoluer, car les collectivités ne sont pas prêtes à des matériaux qui vieillissent différemment.  

En 2031, enfin, il faudra jouer sur tous les tableaux. D’ici-là, des produits moins carbonés seront disponibles, dont du béton
bas-carbone sur lequel planchent les cimentiers. « 
Cette trajectoire par étapes laisse au secteur de la construction, qui a peu évolué depuis des décennies, le temps de se préparer », confie Rodrigue Leclech. « Mais avec le ZAN (zéro artificialisation nette) et de nombreux bâtiments existants mal occupés, le vrai sujet, c’est la rénovation », conclut-il.  

 

par la rédaction de decarbonation2030